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venir pères, à remplir les fonctions de la vie, qu’ils s’en aillent tous ensemble loin d’ici, sans laisser la moindre semence d’eux-mêmes, et que la terre soit débarrassée de cette engeance. Mais, s’ils veulent se marier, avoir des enfants, manger des fruits de la terre, participer aux choses de la vie, à ses biens comme à ses maux, il faut qu’ils rendent à ceux qui sont chargés de tout administrer les honneurs qui conviennent… Nous devons continuellement, et dans nos paroles et dans nos actions, et même quand nous ne parlons ni n’agissons, tenir notre âme tendue vers Dieu. Cela posé, quel mal y a-t-il à rechercher la bienveillance de ceux qui ont reçu de Dieu leur pouvoir, et en particulier celle des rois et des puissants de la terre ? Ce n’est pas, en effet, sans l’intervention d’une force divine qu’ils ont été élevés au rang qu’ils occupent[1].


En bonne logique, Celse avait tort. Il ne se borne pas à demander aux chrétiens la confraternité politique ; il veut aussi la confraternité religieuse. Il ne se borne pas à leur dire : « Gardez vos croyances ; servez avec nous la même patrie, laquelle ne vous demande rien de contraire à vos principes. » Non, il veut que les chrétiens prennent part à des cérémonies opposées à leurs idées. Il leur fait de mauvais raisonnements, pour leur montrer que le culte polythéiste ne doit pas les choquer.


Sans doute, dit-il, si l’on voulait obliger un homme pieux à commettre quelque action impie ou à prononcer quelque

  1. Celse, dans Orig., VIII, 55, 63.