Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/368

Cette page a été validée par deux contributeurs.

penses et les peines futures paraissent à Celse des parties intégrantes d’une doctrine d’État[1]. Il faut se rappeler que la possibilité de la magie était alors presque un dogme. On était épicurien, athée, impie, on courait risque de la vie, si on se permettait de la nier[2]. Toutes les sectes, les épicuriens exceptés, en enseignaient la réalité[3]. Celse y croit sérieusement. Sa raison lui montre la fausseté des croyances surnaturelles généralement admises ; mais l’insuffisance de son éducation scientifique et ses préjugés politiques l’empêchent d’être conséquent ; il maintient, au moins en principe, des croyances tout aussi peu rationnelles que celles qu’il combat. La faible connaissance que l’on avait alors des lois de la nature rendait possibles toutes les crédulités. Tacite est sûrement un esprit éclairé, et pourtant il n’ose repousser nettement les prodiges les plus puérils[4]. Les apparitions

  1. Dans Orig., VII, 62, 68-70 ; VIII, 2, 11, 12, 13, 14, 15, 24, 28, 33, 35, 45, 48, 53, 55, 58, 60, 62, 63. Cf. Minucius Félix, Octavius, ch. vii.
  2. Lucien, Alexandre, 25 ; Philopseudès, 10 ; Apulée, Apologie, tout entière.
  3. Lucien, Philopseudès, 6, 7 et suiv. ; Vitarum auctio, 2. Plus tard, le christianisme poursuivit la magie, non comme vaine, mais comme impliquant un commerce illicite entre l’homme et les démons. Cf. Paul, Sent., V, xxiii, 9, 11, 12.
  4. Tacite, Hist., II, 50. Comparez la mention des présages dans Suétone, Dion Cassius, Hérodien et les biographes de l’Histoire Auguste.