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aveu que celui-là. Cette obstination ne faisait que redoubler la fureur du légat et des questionnaires. Ayant épuisé tous leurs moyens sans le vaincre, ils eurent l’idée de lui faire appliquer des lames de cuivre chauffées à blanc sur les organes les plus sensibles. Sanctus, pendant ce temps, restait inflexible, ne sortait pas de sa confession obstinée : Christianus sum. Son corps n’était qu’une plaie, une masse saignante, tordue, convulsionnée, contractée, ne présentant plus aucune forme humaine. Les fidèles triomphaient, disant que Christ savait rendre les siens insensibles et se substituait à eux, quand ils étaient dans les tortures, pour souffrir à leur place. Ce qu’il y eut d’horrible, c’est que, quelques jours après, on recommença la torture de Sanctus. L’état du confesseur était tel que, à le toucher de la main, on le faisait bondir de douleur. Les bourreaux reprirent les unes après les autres ses plaies enflammées, on renouvela chacune de ses blessures, on répéta sur chacun de ses organes les effroyables expériences du premier jour ; on espérait ou le vaincre ou le voir mourir dans les tourments, ce qui eût effrayé les autres. Il n’en fut rien ; Sanctus résista si bien, que ses compagnons crurent à un miracle et prétendirent que cette seconde torture, faisant sur lui l’effet d’une cure, avait redressé ses