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vèrent donc tout simple que la source des dons de Dieu ne fût pas tarie. Plusieurs membres distingués de l’Église lyonnaise étaient originaires de la Phrygie ; un certain Alexandre, médecin de profession, qui demeurait dans les Gaules depuis plusieurs années, venait de ce pays. Cet Alexandre, qui étonnait tout le monde par son amour de Dieu et par la hardiesse de sa prédication, semblait favorisé de tous les charismes apostoliques[1].

Les Lyonnais, à distance, nous font donc l’effet d’appartenir sous beaucoup de rapports au cercle piétiste d’Asie Mineure. Ils recherchent le martyre, ils ont des visions, pratiquent les charismes, jouissent d’entretiens avec le Saint-Esprit ou Paraclet[2], conçoivent l’Église comme une vierge[3]. Un millénarisme ardent[4], une préoccupation constante de l’Antechrist et de la fin du monde[5] étaient en quelque sorte le sol commun où ces grands enthousiasmes puisaient leur sève. Mais une touchante docilité, jointe à un rare bon sens pratique, mettait la majorité des fidèles de Lyon en suspicion contre le mauvais esprit qui se cachait fréquemment sous ces orgueilleuses singularités.

  1. Lettre des Églises de Lyon et de Vienne, dans Eus., V, i, 49.
  2. Eus., V, i, 11, 34 ; iii, 3, 4. Voyez ci-après, p. 315.
  3. Lettre, dans Eus., V, i, 45.
  4. Se rappeler Irénée, V, ch. xxxiii.
  5. Voir ci-après, p. 340.