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sophique qu’il donnait au christianisme, ses idées claires et purement déistes sur les rapports de Dieu et de l’homme[1], sa médiocrité intellectuelle elle-même, le préservaient des aberrations sorties d’une spéculation intempérante. La chute de ses amis, Florinus et Blastus, lui servait d’exemple. Il ne voyait de salut que dans la ligne moyenne représentée par l’Église universelle. L’autorité de cette Église, la catholicité, lui parut l’unique critérium de vérité.

Le gnosticisme, en effet, disparut de la Gaule, et par la violente antipathie qu’il inspira aux orthodoxes, et par une transformation lente, qui ne laissa subsister de ses ambitieuses théories qu’un mysticisme inoffensif. Un marbre du iiie siècle, trouvé à Autun[2], nous a conservé un petit poème présentant, comme le huitième livre des oracles sibyllins[3], l’acrostiche ΙΧΘϒΣ. Les pieux valentiniens et les orthodoxes ont pu goûter également le style singulier de cet étrange morceau :


Ô race divine de l’ΙΧΘϒΣ céleste, reçois avec un cœur plein de respect la vie immortelle parmi les mortels ; rajeunis ton âme, mon très cher, dans les eaux divines, par les

  1. Irénée, IV, ch. xxxvii, xxxviii, xxxix.
  2. Le Blant, Inscr. chrét. de la Gaule, I, no  4 ; Corpus inscr. græc., no  9890 ; Pohl, Das Ichthys-Monument von Autun, Berlin, 1880.
  3. Voir l’Église chrét., p. 535.