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cette science les élevait au-dessus de toute puissance, si bien qu’ils pouvaient librement faire ce qu’ils voulaient. On prétendait que le mode de leur initiation était des plus inconvenants. On dressait un cabinet en forme de chambre nuptiale ; puis, avec un appareil de mysticité douteuse et des mots cabalistiques, on feignait de procéder à des noces spirituelles, calquées sur celles des syzygies supérieures. Grâce à leurs rites et à l’emploi de certaines invocations à Sophia, les markosiens croyaient même obtenir une sorte d’invisibilité, qui les faisait échapper, dans leurs chapelles nuptiales, aux yeux du souverain juge[1]. Comme tous les gnostiques, ils abusaient des onctions d’huile et de baume ; ils en composaient toute sorte de sacrements, d’apolytroses ou rédemptions, remplaçant même le baptême[2]. Leur extrême-onction sur les mourants avait quelque chose de touchant et est seule restée en usage[3].

Pothin et Irénée résistèrent énergiquement à ces guides pervers. Irénée puisa dans la lutte l’idée de son grand ouvrage Contre les hérésies, vaste arsenal d’arguments contre toutes les variétés du gnosticisme. Son jugement droit et modéré, la base philo-

  1. Irénée, I, xiii, 6.
  2. Irénée, I, ch. xxi ; cf. xiii, 6.
  3. Irénée, I, xxi, 5.