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de la parfaite douceur ; Sextus de Chéronée, si grave et si bon ; Alexandre de Cotiée, qui reprenait avec une politesse si raffinée ; Fronton, « qui lui apprit ce qu’il y a dans un tyran d’envie, de duplicité, d’hypocrisie, et ce qu’il peut y avoir de dureté dans le cœur d’un patricien » ; son frère Sévérus, « qui lui fit connaître Thraséa, Helvidius, Caton, Brutus, qui lui donna l’idée de ce qu’est un État libre, où la règle est l’égalité naturelle des citoyens et l’égalité de leurs droits ; d’une monarchie qui respecte avant tout la liberté des citoyens » ; et, dominant tous les autres de sa grandeur immaculée, Antonin, son père par adoption, dont il nous trace le portrait avec un redoublement de reconnaissance et d’amour.


Je remercie les dieux, dit-il en terminant, de m’avoir donné de bons aïeuls, de bons parents, une bonne sœur, de bons maîtres, et, dans mon entourage, dans mes proches, dans mes amis, des gens presque tous remplis de bonté. Jamais je ne me suis laissé aller à aucun manque d’égards envers eux ; par ma disposition naturelle, j’aurais pu, dans l’occasion, commettre quelque irrévérence ; mais la bienfaisance des dieux n’a pas permis que la circonstance s’en soit présentée. Je dois encore aux dieux d’avoir conservé pure la fleur de ma jeunesse ; de ne m’être pas fait homme avant l’âge, d’avoir même différé au-delà ; d’avoir été élevé sous la loi d’un prince et d’un père qui devait dégager mon âme de toute fumée d’orgueil, me faire comprendre qu’il est possible, tout en vivant dans un