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pas eu à soutenir une attaque aussi furieuse[1].

C’est une vérité bien constatée que le progrès philosophique des lois ne répond pas toujours à un progrès dans la force de l’État. La guerre est chose brutale ; elle veut des brutaux ; souvent il arrive ainsi que les améliorations morales et sociales entraînent un affaiblissement militaire. L’armée est un reste de barbarie, que l’homme de progrès conserve comme un mal nécessaire ; or, il est rare qu’on fasse avec succès ce qu’on fait comme un pis aller. Antonin avait déjà une forte aversion pour l’emploi des armes[2] ; sous son règne, les mœurs des camps s’amollirent beaucoup[3]. On ne peut nier que l’armée romaine n’eût perdu sous Marc-Aurèle une partie de sa discipline et de sa vigueur[4]. Le recrutement se faisait difficile-

  1. Jules Capitolin, Ant. Phil., 12 et suiv., 17, 21 et suiv., Lucius Verus, 7, 8 ; Pertinax, 2 ; Dion Gassius, LXXI, 3 et suiv. ; Pausanias, VIII, xliii, 6 ; X, xxxiv, 5 ; Hérodien, I, 3 ; Carm. sib., XII, 194 et suiv. ; Petrus Patricius, Exc. de leg., p. 24 (Paris, 1648) ; Ammien Marcellin, XXIX, vi, 1 ; XXXI, v, 13. Eutrope, VIII, 12 ; Aurelius Victor, Cæs. et Epit., 16 ; Orelli, no 861 ; la colonne Antonine et les restes de l’arc de triomphe de Marc-Aurèle, au Palais des conservateurs, à Rome ; Desvergers, Essai sur Marc-Aurèle, p. 140 et suiv.
  2. Eutrope, VIII, 8.
  3. Fronton, Epist. ad Luc. Ver., II, 1 ; ad amicos, I, 6 ; Principia historiæ, p. 206 et suiv. (Naber).
  4. Lettre d’Avidius Cassius, dans Vulc. Gall., Vie d’Avidius, 11, et en général toute cette vie.