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l’amour[1]. Les gens qui craignent les femmes sont, en général, ceux qui les aiment le plus. Que de fois on peut dire avec justesse à l’ascète : Fallit te incautum pietas tua[2]. Dans certaines parties de la communauté chrétienne, on vit paraître, à diverses reprises, l’idée que les femmes ne doivent jamais être vues, que la vie qui leur convient est une vie de réclusion, selon l’usage qui a prévalu dans l’Orient musulman[3]. Il est facile de voir à quel point, si une telle pensée eût prévalu, le caractère de l’église eût été altéré. Ce qui distingue, en effet, l’église de la mosquée et même de la synagogue, c’est que la femme y entre librement et y est sur le même pied que l’homme, quoique séparée ou même voilée. Il s’agissait de savoir si le christianisme serait, comme le fut plus tard l’islamisme, une religion d’hommes, d’où la femme

  1. Les études récemment faites ont bien montré que l’accès hystérique donne à la femme une beauté passagère, une sorte d’idéalisation momentanée, et que cet état maladif, inspirant une chasteté relative, rend sans danger pour les mœurs les relations intimes des deux sexes.
  2. J’ai vu, en Orient, une jeune fille danser avec une retenue charmante les danses les plus voluptueuses ; elle voulait se faire religieuse. J’ai appris ensuite qu’elle devint folle la première nuit de son mariage. Lire l’épisode d’Athanase chez la belle vierge d’Alexandrie, Sozomène, V, 6.
  3. C’est ce qui est particulièrement sensible chez l’auteur, très juif d’esprit, du Testament des douze patriarches. Lire Ruben tout entier. Voir aussi Tertullien, De virginibus velandis.