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a prétendu enseigner l’imitation de Jésus-Christ est un livre de cloître. Satisfait de savoir que la morale prêchée par Jésus est pratiquée quelque part, le laïque se consolera de ses attaches mondaines et s’habituera facilement à croire que de si hautes maximes de perfection ne sont pas faites pour lui. — Le bouddhisme a résolu la question d’une autre manière. Tout le monde y est moine une partie de sa vie. Le christianisme est content s’il y a quelque part des lieux où la vraie vie chrétienne se pratique ; le bouddhiste est satisfait pourvu qu’à un moment de sa vie il ait été parfait bouddhiste.

Le montanisme fut une exagération, il devait périr. Mais, comme toutes les exagérations, il laissa des traces profondes. Le roman chrétien fut en partie son ouvrage. Ses deux grands enthousiasmes, chasteté et martyre, restèrent les deux éléments fondamentaux de la littérature chrétienne. C’est le montanisme qui inventa cette étrange association d’idées, créa la Vierge martyre et, introduisant le charme féminin dans les plus sombres récits de supplices, inaugura cette bizarre littérature dont l’imagination chrétienne, à partir du IVe siècle, ne se détacha plus. Les Actes montanistes de sainte Perpétue et des martyrs d’Afrique respirant la foi aux charismes, pleins d’un rigorisme extrême et de brûlantes ardeurs, impré-