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cices de rhétorique latine à la manière un peu frivole de son maître Fronton[1], et les méditations de la philosophie[2]. La pédagogie grecque était arrivée à sa perfection, et, comme il arrive en ces sortes de choses, la perfection approchait de la décadence. Les lettrés et les philosophes se partageaient l’opinion et se livraient d’ardents combats. Les rhéteurs ne songeaient qu’à l’ornement affecté du discours ; les philosophes conseillaient presque la sécheresse et la négligence de l’expression[3]. Malgré son amitié pour Fronton et les adjurations de ce dernier[4], Marc-Aurèle fut bientôt un adepte de la philosophie[5]. Junius Rusticus devint son maître favori et le gagna totalement à la sévère discipline qu’il opposait à l’ostentation des rhéteurs. Rusticus resta toujours le confident et le conseiller intime de son auguste élève, qui reconnaissait tenir de lui son goût d’un style simple, d’une tenue digne et sérieuse, sans parler d’un bienfait supérieur encore : « Je lui dois d’avoir connu les Entretiens d’Épictète, qu’il me prêta

  1. Fronton, Epist. ad M. Cæs., II, 2, 17, etc.
  2. Jules Capitolin, Ant. le Phil., 2 ; Athénagore, Leg., 1.
  3. Fragment de la Rhétorique de Chrysippe, dans Plutarque, De stoic. repugn., 28. Cf. Cic., De fin., IV, iii, 6.
  4. Fronton, Epist. ad M. Cæs., I, 8 ; ad Ant. Imp., I, 2 ; De eloq., 3. Cf. Epist. ad Verum, I, 1.
  5. Pensées, VI, 12 ; VIII, 1.