Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/247

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vers 231, constatèrent le mal sans pouvoir le guérir[1]. La crédulité extrême de ces bonnes populations du centre de l’Asie Mineure, Phrygiens, Galates, etc., avait été la cause des promptes conversions au christianisme qui s’y opérèrent ; maintenant, cette crédulité les mettait à la merci de toutes les illusions. Phrygien devint presque synonyme d’hérétique. Vers 235, une nouvelle prophétesse soulève les campagnes de la Cappadoce, allant nu-pieds par les montagnes, annonçant la fin du monde, administrant les sacrements, et voulant entraîner ses disciples à Jérusalem[2]. Sous Dèce, les montanistes fournissent au martyre un contingent considérable.

Nous verrons les embarras de conscience que les sectaires de Phrygie donneront aux confesseurs de Lyon, au plus fort de leur lutte[3]. Partagés entre l’admiration pour tant de sainteté et l’étonnement que causeront à leur droit sens tant de bizarreries, nos héroïques et judicieux compatriotes essaieront en vain d’éteindre la discussion. Un moment aussi l’Église de Rome faillit être surprise. L’évêque Zéphyrin avait déjà presque reconnu les prophéties de

  1. Firmilien, dans saint Cyprien, Epist., 75 ; Eusèbe, VII, 7 ; Tillemont, Mém., II, 671-672 ; Hefele, Conciliengesch., I, p. 82 ; Migne, Patr. lat., III, col. 1151.
  2. Firmilien, dans saint Cyprien, lettre 75.
  3. Voir ci-après, p. 315 et suiv.