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l’enfance de la religion ; l’Évangile en fut la jeunesse ; la venue du Paraclet fut censée être le signe de sa maturité.

Montanus, comme tous les prophètes de l’alliance nouvelle, était plein de malédictions contre le siècle et contre l’empire romain. Même le voyant de 69 était dépassé. Jamais la haine du monde et le désir de voir s’anéantir la société païenne n’avaient été exprimés avec une aussi naïve furie. Le sujet unique des prophéties phrygiennes était le prochain jugement de Dieu, la punition des persécuteurs, la destruction du monde profane, le règne de mille ans et ses délices. Le martyre était recommandé comme la plus haute perfection ; mourir dans son lit passait pour indigne d’un chrétien. Les encratites, condamnant les rapports sexuels, en reconnaissaient au moins l’importance au point de vue de la nature ; Montanus ne prenait même pas la peine d’interdire un acte devenu absolument insignifiant, du moment que l’humanité en était à son dernier soir. La porte se trouvait ainsi ouverte à la débauche, en même temps que fermée aux devoirs les plus doux.

À côté de Montanus paraissent deux femmes, l’une appelée tantôt Prisca, tantôt Priscille, tantôt Quintille, et l’autre, Maximille. Ces deux femmes, qui, à ce qu’il paraît, avaient dû quitter l’état de