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l’épiscopat. Une doctrine depuis longtemps répandue en Asie Mineure, celle d’un Paraclet, qui devait venir compléter l’œuvre de Jésus[1], ou, pour mieux dire, reprendre l’enseignement de Jésus, le rétablir dans sa vérité, le purger des altérations que les apôtres et les évêques y avaient introduites[2], une telle doctrine, dis-je, ouvrait la porte à toutes les innovations. L’Église des saints était conçue comme toujours progressive et comme destinée à parcourir des degrés successifs de perfection. Le prophétisme passait pour la chose du monde la plus naturelle. Les sibyllistes, les prophètes de toute origine couraient les rues, et, malgré leurs grossiers artifices, trouvaient créance et accueil[3].

Quelques petites villes des plus tristes cantons de la Phrygie Brûlée, Tymium, Pépuze, dont le site même est inconnu[4], furent le théâtre de cet enthousiasme tardif. La Phrygie était un des pays de l’antiquité les plus portés aux rêveries religieuses. Les Phrygiens passaient, en général, pour niais et simples[5]. Le christianisme eut chez eux, dès l’ori-

  1. Jean, xiv, xv, xvi. Voir l’Égl. chrét., p. 69, 70
  2. Jean, xvi, 12, 14, 15.
  3. Celse, dans Orig., VII, 9, 11.
  4. Ces petites localités n’étaient pas loin d’Ouschal.
  5. Saint Justin, Dial., 119 ; Cicéron, Pro Flacco, 27.