Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mots et des symboles décidément chrétiens commencent à s’y rencontrer.

L’orthodoxie fut donc ingrate en ne reconnaissant pas les services que lui avaient rendus ces sectes indisciplinées. Dans le dogme, elles ne provoquèrent que de la réaction ; mais leur rôle fut des plus considérables dans la littérature chrétienne et dans les institutions liturgiques. On emprunte presque toujours beaucoup à ceux que l’on anathématise. Le premier christianisme, tout juif encore, était trop simple ; ce furent les gnostiques qui en firent une religion. Les sacrements furent en grande partie leur création ; leurs onctions, surtout au lit de mort des malades, produisaient une grande impression[1]. Le saint chrême, la confirmation (d’abord partie intégrante du baptême), l’attribution d’une force surnaturelle au signe de la croix, plusieurs autres éléments de la mystique chrétienne viennent d’eux[2]. Parti jeune et

  1. Irénée, I, xxi, 3, 5, et la note de dom Massuet.
  2. Celse, dans Orig., Contre Celse, VI, 39, 40 ; Constit. apost., VII, ch. 42-45 ; Recogn., I, 15. Voir surtout les Acta sancti Thomæ, § 26-27 ; Migne, Dict. des apocr., col. 1027-1030, 1041 ; Siouffi, ouvr. cité, p. 80-84. Les fables sur « l’huile de la miséricorde » se rattachent au même fond gnostique. Légende de la pénitence d’Adam et de la Caverne des trésors ; Évang. de Nicod., 2e partie, ch. 3 ; Apoc. de Moïse, Tisch., Apoc. apocr., p. xi, 5, 7. Cf. Hermas, simil. viii, Gebh. et Harn., p. 186-187 ;