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les femmes riches, à qui leur indépendance inspirait le désir d’un rôle personnel. L’Église orthodoxe suivait la règle sévère tracée par saint Paul, laquelle interdisait toute participation de la femme aux exercices de l’Église[1]. Dans ces petites sectes, au contraire, la femme baptisait, officiait, présidait à la liturgie, prophétisait. Aussi opposés que possible de mœurs et d’esprit, les gnostiques et les montanistes avaient cela de commun, que, à côté, de tous leurs docteurs, on trouve une femme prophétesse : Hélène à côté de Simon, Philumène à côté d’Apelle[2], Priscille et Maximille à côté de Montan, tout un cortège de femmes autour de Markos[3] et de Marcion[4]. La fable et la calomnie s’emparèrent d’une circonstance qui prêtait au malentendu. Plusieurs de ces créatures peuvent n’être que des allégories sans réalité ou des inventions des orthodoxes. Mais sûrement l’attitude modeste que l’Église catholique imposa toujours aux femmes, et qui devint la cause de leur ennoblissement, ne fut guère observée dans ces petites sectes, assujetties à une règle moins rigoureuse

  1. Tertull., De bapt., 17.
  2. Apelles lapsus in feminam. Tertullien, De præscr., 30.
  3. Irénée, I, xiii.
  4. Ex illis suis sanctioribus feminis. Tertullien, Adversus Marcionem, V, 8.