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des écrits vraiment authentiques de la première inspiration chrétienne par sa prolixité, sa rhétorique, sa philosophie abstraite, empruntée, pour la plus grande partie, aux écoles grecques. Ce n’est plus ici un livre sémitique, sans nuance, comme les écrits purement judéo-chrétiens. Grand admirateur du judaïsme, l’auteur a l’esprit gréco-italien, l’esprit politique, préoccupé avant tout de la nécessité sociale, de la morale du peuple. Sa culture est tout hellénique ; de l’hellénisme, il ne repousse qu’une seule chose, la religion. L’auteur se montre à tous égards bien supérieur à saint Justin. Une fraction considérable de l’Église adopta l’ouvrage et lui fit une place à côté des livres les plus révérés de l’âge apostolique, sur les confins du Nouveau Testament[1]. Les grosses erreurs qu’on y lisait sur la divinité de Jésus-Christ et sur les livres saints s’opposèrent à ce qu’il y restât ; mais on continua de le lire ; les orthodoxes répondaient à tout en disant que Clément avait écrit son livre sans tache, qu’ensuite des hérétiques l’avaient altéré[2]. On en fit des extraits, où les passages malsonnants étaient omis, et auxquels on attri-

  1. Credner, Gesch. des neutest. Kanon, p. 238, 241, 244, 249, 250 ; Tillemont, Mém., II, p. 163.
  2. Synopse dite d’Athanase, dans Credner, op. cit., p. 250, Dressel, Clementinorum epitomæ duæ, Leipzig, 1873 ; Reuss, Gesch. der heiligen Schriften, p. 252.