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gens d’Amschit et de Gébeil. Le soleil baissait quand nous arrivâmes à l’embouchure du fleuve Adonis ; nous nous y reposâmes. Quoique ses douleurs fussent loin d’avoir disparu, le calme voluptueux de ce bel endroit s’empara d’elle ; elle eut un moment de douce gaieté. Nous montâmes au clair de lune la montagne de Ghazir ; elle était très contente, et nous croyions, en quittant le rivage brûlant, laisser derrière nous les causes de souffrances que nous y avions trouvées.

Ghazir est sans contredit l’un des endroits les plus beaux du monde ; les vallées voisines sont d’une verdure délicieuse, et la pente d’Aramoun, un peu plus haut, est le plus charmant paysage que j’aie vu dans le Liban ; mais la population, gâtée par le contact des familles prétendues aristocratiques du pays, n’a pas les bonnes qualités ordinaires du peuple maronite. Nous y trouvâmes une petite maison, avec une jolie treille. La nous prîmes quelques jours d’un bien doux repos. Nous avions de la neige des crevasses de la haute montagne. Nos pauvres compagnons de voyage, sa bonne jument arabe, ma mule Sada, paissaient sous