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étaient finies, l’armée avait évacué la Syrie. Nous restâmes seuls ensemble pour veiller à l’enlèvement des objets, achever l’exploration du haut Liban et préparer pour l’automne suivant une nouvelle campagne à Chypre. Je déplore maintenant de mes larmes les plus amères le parti que je pris de prolonger ainsi notre séjour durant les mois qui sont, en Syrie, les plus dangereux pour l’Européen. Notre dernier voyage dans le Liban la fatigua beaucoup. Nous demeurâmes trois jours à Maschnaka, au-dessus du fleuve Adonis, logés dans une hutte de boue. Le passage continuel des vallées froides aux rochers torrides, la mauvaise nourriture, l’obligation de coucher la nuit dans des maisons très basses où, pour ne pas étouffer, il fallait tenir tout ouvert, lui donnèrent le germe de douleurs nerveuses, qui se développèrent bientôt. Au sortir des vallées profondes de Tannourin, après avoir couché au couvent de Mar-Iakoub, sur une des dents les plus abruptes de ces parages, nous entrâmes dans la région brûlante de Toula. Ce brusque contraste nous accabla. Vers onze heures, au village de Helta, elle