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nous avons formée ; de deux choses l’une : ou bien le voyage d’Italie se prolongera jusqu’en France, et alors ce sera ton voyage de retour ; car compte bien ne jamais nous quitter. Ou bien il se bornera à l’Italie, et alors tu diras adieu aux Zamovski dans ce beau pays, et tu nous viendras au printemps prochain. Entends-tu, chère amie ? Ceci est arrêté, immuable, sans appel. Dis donc un adieu éternel aux lieux que tu parcours, et livre-toi à cette délicieuse impression qui doit accompagner le retour de l’exil.

J’imagine tout ce que ton dévouement pourra objecter contre notre résolution commune. Oh ! que ne puis-je te convaincre, comme je suis convaincu moi-même, que c’est en vertu même de ce dévouement que tu dois nous revenir et nous rester. Il est évident que ta santé n’y résisterait pas ; or, ma pauvre amie, que serais-je sans toi ! Dieu, cette pensée me fait horreur : elle s’empara de mon imagination au moment où je lisais le mot fatal de mademoiselle Ulliac, et je n’oublierai jamais l’affreux cauchemar que j’éprouvai. Henriette, que serais-je sans toi, et à présent,