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indiscrétion sera moins à craindre pour les démarches que je vais commencer, dis-le-moi, mon bon Ernest, afin que je puisse réclamer les services de la personne qui m’avait conseillé la première de mettre un intervalle entre tes études et tes engagements. D’ici là, je ne lui en parlerai point ; mais j’agirai par ailleurs. Je pense même que, près de lui aussi, il me serait possible de faire une première demande sans te compromettre en rien. Je verrai… Tu comprends bien, n’est-ce pas, que j’ai plusieurs cordes à mon arc et que, dans tous les cas, des études libres te seront toujours possibles. Ernest, mon bon enfant, que ne puis-je te voir au moins pendant une heure ?… Je te sais accablé de tristesse et de tourments, et je suis à cinq cents lieues de toi. Mon Dieu, soyez pour lui ce qu’il ne m’est plus permis d’être, la voix qui console, l’ami qui soutient ! — De tout ceci, mon bon Ernest, tu concluras facilement avec quelle anxiété j’attendrai de tes nouvelles. Écris-moi donc quand cela te sera possible, et surtout si quelque nouveau chagrin venait encore bouleverser ton âme. Je ne sais plus prévoir que des douleurs.