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sanides ressuscités ; les conseillers intimes, les précepteurs des princes, les premiers ministres sont les Barmékides, famille de l’ancienne Perse, très éclairée, restée fidèle au culte national, au parsisme, et qui ne se convertit à l’islam que tard et sans conviction. Les nestoriens entourèrent bientôt ces califes peu croyants et devinrent, par une sorte de privilège exclusif, leurs premiers médecins. Une ville qui a eu dans l’histoire de l’esprit humain un rôle tout à fait à part, la ville de Harran, était restée païenne et avait gardé toute la tradition scientifique de l’antiquité grecque ; elle fournit à la nouvelle école un contingent considérable de savants étrangers aux religions révélées, surtout d’habiles astronomes.

Bagdad s’éleva comme la capitale de cette Perse renaissante. La langue de la conquête, l’arabe, ne put être supplantée, non plus que la religion tout à fait reniée ; mais l’esprit de cette nouvelle civilisation fut essentiellement mixte. Les Parsis, les chrétiens, l’emportèrent ; l’administration, la police en particulier, fut entre les mains des chrétiens. Tous ces brillants califes, contemporains de nos Carlovingiens, Mansour, Haroun al-Raschid, Mamoun sont à peine musulmans. Ils pratiquent extérieurement la religion dont ils sont les chefs, les papes, si l’on peut s’exprimer ainsi ; mais leur esprit est ailleurs. Ils sont curieux de toute chose, surtout des choses exotiques et païennes ; ils interrogent l’Inde, la vieille Perse, la Grèce surtout. Parfois, il est vrai, les piétistes mu-