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On m’objectera ce qu’on appelle le type juif. Il y en aurait long à dire sur ce point. Mon opinion est qu’il n’y a pas un type juif, mais qu’il y a des types juifs. J’ai acquis à cet égard une assez grande expérience, ayant été pendant dix ans à la Bibliothèque nationale, attaché à la collection des manuscrits hébreux, en sorte que les savants israélites du monde entier s’adressaient à moi pour consulter notre précieuse collection. Je reconnaissais très vite mes clients, et, d’un bout à l’autre de la salle, je devinais ceux qui allaient venir à mon bureau. Eh bien, le résultat de mon expérience est qu’il n’y a pas un type juif unique, mais qu’il y en a plusieurs, lesquels sont absolument irréductibles les uns aux autres. Comment la race s’est-elle ainsi cantonnée en quelque sorte dans un certain nombre de types ? Par suite de ce que nous disions tout à l’heure, par la séquestration, le ghetto, par l’interdiction des mariages mixtes.

L’ethnographie est une science fort obscure ; car on ne peut pas y faire d’expérience, et il n’y a de certain que ce qu’on peut expérimenter. Ce que je vais dire n’est pas pour prouver, c’est seulement pour expliquer ma pensée. Je crois que, si l’on prenait au hasard des milliers de personnes, celles, par exemple, qui se promènent en ce moment d’un bout à l’autre du boulevard Saint-Germain, qu’on les suppose déportées dans une île déserte et libres de s’y multiplier ; je crois, dis-je qu’au bout d’un temps donné, les types seraient réduits, massés en quelque sorte, concentrés en un