Page:Renan - La Vie de Jésus.djvu/518

Cette page n’a pas encore été corrigée

chrétiens, et non à celui que la légende a déifié. L’inégalité des hommes est bien plus marquée en Orient, que chez nous. Il n’est pas rare de voir s’y élever, au milieu d’une atmosphère générale de méchanceté, des caractères dont la grandeur nous étonne. Bien loin que Jésus ait été créé par ses disciples, Jésus apparaît en tout comme supérieur à ses disciples. Ceux-ci, saint Paul et saint Jean exceptés, étaient des hommes sans invention ni génie. Saint Paul lui-même ne supporte aucune comparaison avec Jésus, et quant à saint Jean, je montrerai plus tard que son rôle, très élève en un sens, fut loin d’être à tous égards irréprochable. De là l’immense supériorité des Évangiles au milieu des écrits du Nouveau Testament. De là cette chute pénible qu’on éprouve en passant de l’histoire de Jésus à celle des apôtres. Les évangélistes eux-mêmes, qui nous ont légué l’image de Jésus, sont si fort au-dessous de celui dont ils parlent que sans cesse ils le défigurent, faute d’atteindre à sa hauteur. Leurs écrits sont pleins d’erreurs et de contre-sens. On sent à chaque ligne un discours d’une beauté divine fixé par des rédacteurs qui ne le comprennent pas, et qui substituent leurs propres idées à celles qu’ils ne saisissent qu’à demi. En somme, le caractère de Jésus, loin d’avoir été embelli par ses biographes, a été diminué par eux. La