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ont offensés. Épargne-nous les épreuves ; délivre-nous du Méchant. » Il insistait particulièrement sur cette pensée que le Père céleste sait mieux que nous ce qu’il nous faut, et qu’on lui fait presque injure en lui demandant telle ou telle chose déterminée.

Jésus ne faisait en ceci que tirer les conséquences des grands principes que le judaïsme avait posés, mais que les classes officielles de la nation tendaient de plus en plus à méconnaître. La prière grecque et romaine fut presque toujours un verbiage plein d’égoïsme. Jamais prêtre païen n’avait dit au fidèle : « Si, en apportant ton offrande à l’autel, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse-là ton offrande devant l’autel, et va premièrement te réconcilier avec ton frère ; après cela viens et fais ton offrande. » Seuls dans l’antiquité, les prophètes juifs, Isaïe surtout, dans leur antipathie contre le sacerdoce, avaient entrevu la vraie nature du culte que l’homme doit à Dieu. « Que m’importe la multitude de vos victimes ? J’en suis rassasié ; la graisse de vos béliers me soulève le cœur ; votre encens m’importune ; car vos mains sont pleines de sang. Purifiez vos pensées ; cessez de mal faire, apprenez le