Page:Renan - La Vie de Jésus.djvu/124

Cette page n’a pas encore été corrigée

la vertu, il ne pensa qu’à son œuvre, à sa race, a l’humanité. Ces montagnes, cette mer, ce ciel d’azur, ces hautes plaines à l’horizon, furent pour lui non la vision mélancolique d’une âme qui interroge la nature sur son sort, mais le symbole certain, l’ombre transparente d’un monde invisible et d’un ciel nouveau.

Il n’attacha jamais beaucoup d’importance aux événements politiques de son temps, et il en était probablement mal informé. La dynastie des Hérodes vivait dans un monde si différent du sien, qu’il ne la connut sans doute que de nom. Le grand Hérode mourut vers l’année même où il naquit, laissant des souvenirs impérissables, des monuments qui devaient forcer la postérité la plus malveillante d’associer son nom à celui de Salomon, et néanmoins une œuvre inachevée, impossible à continuer. Ambitieux profane, égaré dans un dédale de luttes religieuses, cet astucieux Iduméen eut l’avantage que donnent le sang-froid et la raison, dénués de moralité, au milieu de fanatiques passionnés. Mais son idée d’un royaume profane d’Israël, lors même qu’elle n’eût pas été un anachronisme dans l’état du monde où il la conçut, aurait échoué, comme le projet semblable que forma Salomon, contre les difficultés venant du caractère même de la nation. Ses trois fils ne furent que des lieutenants des Romains, analogues aux radjas de