ble plus à un catholique ou à un buddhiste qu’à un rieur sceptique, et j’en ai pour preuve mes sympathies intérieures. J’aime l’un, je déteste l’autre. Je puis même me dire chrétien, en ce sens que je reconnais devoir au christianisme la plupart des éléments de ma foi, à peu près comme M. Cousin a pu se dire platonicien ou cartésien, sans accepter tout l’héritage de Platon et de Descartes, et surtout sans s’obliger à les regarder comme des prophètes. Et ne dites pas que c’est abuser des mots que de m’arroger ainsi un nom dont j’altère profondément l’acception. Sans doute, si l’on entend par religion un ensemble de dogmes imposés et de pratiques extérieures, alors je l’avoue, je ne suis pas religieux ; mais je maintiens aussi que l’humanité ne l’est pas essentiellement et ne le sera pas toujours en ce sens. Ce qui est de l’humanité, ce qui par conséquent sera éternel comme elle, c’est le besoin religieux, la faculté religieuse, à laquelle ont correspondu jusqu’ici de grands ensembles de doctrine et de cérémonies, mais qui sera suffisamment satisfaite par le culte pur des bonnes et belles choses. Nous avons donc droit de parler de religion, puisque nous avons l’analogue, sinon la chose même, puisque le besoin qui autrefois était satisfait par les religions positives l’est chez nous par quelque chose d’équivalent, qui peut à bon droit s’appeler du même nom. Que si l’on s’obstinait absolument à prendre ce mot dans un sens plus restreint, nous ne disputerions pas sur cette libre définition, nous dirions seulement que la religion ainsi entendue n’est pas chose essentielle et qu’elle disparaîtra de l’humanité, laissant vide une place qui sera remplie par quelque chose d’analogue.
On a beaucoup parlé depuis quelques années de retour religieux, et je reconnais volontiers que ce retour s’est gé-