à un autre que Dieu le nom de « maître ; » Jésus laisse ce nom à qui veut le prendre, et réserve pour Dieu un titre plus doux. Accordant aux puissants de la terre, pour lui représentants de la force, un respect plein d’ironie, il fonde la consolation suprême, le recours au Père que chacun a dans le ciel, le vrai royaume de Dieu que chacun porte en son cœur.
Ce nom de « royaume de Dieu » ou de « royaume du ciel » fut le terme favori de Jésus pour exprimer la révolution qu’il apportait en ce monde. Comme presque tous les termes relatifs au Messie, il venait du livre de Daniel. Selon l’auteur de ce livre extraordinaire, aux quatre empires profanes, destinés à crouler, succédera un cinquième empire, qui sera celui des saints et qui durera éternellement. Ce règne de Dieu sur la terre prêtait naturellement aux interprétations les plus diverses. Dans les derniers temps de sa vie, Jésus crut que ce règne allait se réaliser matériellement par un brusque renouvellement du monde. Mais sans doute ce ne fut pas là sa première pensée. La morale admirable qu’il tire de la notion du Dieu père n’est pas celle d’enthousiastes qui croient le monde près de finir et qui se préparent par l’ascétisme à une catastrophe chimérique ; c’est celle d’un monde qui veut vivre et qui a vécu. « Le royaume de Dieu est au dedans de vous, » disait-il à ceux qui cherchaient avec subtilité des signes extérieurs. La conception réaliste de l’avénement divin n’a