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reviennent toujours. Jésus ne pouvait souffrir qu’on rudoyât ces naïfs auditeurs ; il les faisait approcher de lui et les embrassait. Les mères, encouragées par un tel accueil, lui apportaient leurs nourrissons pour qu’il les touchât. Des femmes venaient verser de l’huile sur sa tête et des parfums sur ses pieds. Ses disciples les repoussaient parfois comme importunes ; mais Jésus, qui aimait les usages antiques et tout ce qui indique la simplicité du cœur, réparait le mal fait par ses amis trop zélés. Il protégeait ceux qui voulaient l’honorer. Aussi les enfants et les femmes l’adoraient. Le reproche d’aliéner de leur famille ces êtres délicats, toujours prompts à être séduits, était un de ceux que lui adressaient le plus souvent ses ennemis.

La religion naissante fut ainsi à beaucoup d’égards un mouvement de femmes et d’enfants : Ces derniers faisaient autour de Jésus comme une jeune garde pour l’inauguration de son innocente royauté, et lui décernaient de petites ovations auxquelles il se plaisait fort, l’appelant « fils de David, » criant Hosanna[1], et portant des palmes autour de lui. Jésus était bien aise de voir ces jeunes apôtres, qui ne le compromettaient pas, se lancer en avant et lui décerner des titres qu’il n’osait prendre lui-même. Il les laissait dire, et, quand on lui demandait s’il entendait, il répondait d’une façon évasive

  1. Cri qu’on poussait a la procession de la fête des Tabernacles en agitant les palmes.