Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.

risé ; il est le législateur, le révélateur, l’organe de Dieu à l’égard de l’homme spirituel. Il est l’Esprit de Dieu, la Sagesse des livres saints. Philon n’a pas d’idée du Messie et n’établit aucun rapport entre son Logos et l’être divin rêvé par ses compatriotes de Palestine. Il ne sort pas de l’abstrait. Le Logos est pour lui le lieu des esprits, comme l’espace est le lieu des corps[1] ; il va jusqu’à l’appeler un « second Dieu » ou « l’homme de Dieu », c’est-à-dire Dieu considéré comme anthropomorphe[2]. Connaître le Logos, contempler la raison, c’est-à-dire Dieu et l’univers, voilà la fin de l’homme. Par cette connaissance, l’homme trouve la vie, la vraie manne qui le nourrit[3].

Quoique de telles idées fussent aussi éloignées que possible par leur origine des idées messianiques, on entrevoit cependant qu’une sorte de fusion pouvait s’opérer entre elles. La possibilité d’une incarnation plénière du Logos rentre tout à fait dans l’ordre des

  1. Ὡς γὰρ ὁ τόπος περιεκτικὸς σωμάτων ἐστὶ καὶ καταφυγή, οὕτω καὶ ὁ θεῖος λόγος περιέχει τὰ ὅλα καὶ πεπλήρωκεν. Philon, l. c.
  2. Δεύτερος θεός, fragm. dans Eus., Præp. evang., VII, 13. Ailleurs, ὁ πρωτόγονος υἱός, ὁ ἄγγελος πρεσϐύτατος, ἀρχάγγελος, ἄνθρωπος θεοῦ (voir surtout, De somniis, I, 40, 41). Comparez, dans la cabbale juive, l’ange Métatrône et l’ange Sandalphon (μετάθρονος – συνάδελφος).
  3. Allég. de la Loi, livre III, entier.