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fidèles qui y trouvent un entretien pour leur piété.

L’ouvrage a par moments du charme ; mais un certain manque de goût et de talent s’y fait sentir. Le symbolisme, si énergique et si juste dans les anciennes apocalypses, est ici mou, maladroit, sans adaptation précise. La veine du prophétisme chrétien est tout à fait affaiblie. La langue, simple et en quelque sorte aplatie, est presque du grec moderne pour la syntaxe ; le choix de l’expression, au contraire, est assez heureux. C’est l’éloquence d’un curé de campagne, bonasse et grondeur[1], mêlée aux soucis d’un sacristain préoccupé de gazes, de coussins, de tout ce qui sert à endimancher son église. Hermas, malgré ses tentations et ses peccadilles, est sûrement la chasteté même, bien que la façon dont il insiste sur ce point nous fasse un peu sourire. Aux terribles images des anciennes apocalypses, aux sombres visions de Jean, de pseudo-Esdras[2], succèdent les douceâtres imaginations d’un petit roman dévot, à la fois touchant et niais, dont le style enfantin n’est pas exempt de fadeur.

La tentative prophétique de pseudo-Hermas ne fut pas, du reste, un fait isolé. Elle tenait à l’état

  1. Vis. iii, 9 ; Mand. xii, 2 ; Sim. x, 4.
  2. L’auteur d’Hermas paraît connaître et imiter ces deux Apocalypses.