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et ne cessaient pas d’être médisants, envieux, brouillons, hardis, présomptueux. Les disputes de préséance étaient fréquentes. La gestion des fonds de l’Église donnait lieu à des abus ; certains diacres prenaient pour eux le bien des veuves et des orphelins. Enfin, les maîtres de doctrines étrangères pullulaient et séduisaient les fidèles. Placés comme des juges au milieu de toutes ces misères, les saints inclinaient tantôt à l’indulgence, tantôt à la rigueur. Ce qu’il y avait de grave, c’est que certains docteurs sectaires flattaient ceux qui avaient péché, dans des vues d’intérêt personnel. Ils leur vendaient en quelque sorte le relâchement, et, dans l’espérance d’être récompensés de leur casuistique[1], ils leur disaient qu’ils n’avaient pas besoin de pénitence, et que les pasteurs étaient des gens d’une sévérité exagérée.

Le fait est que, dans une pareille assemblée de saints, il n’y avait guère de place pour la tiédeur. Une piété exaltée portait à tout croire. La prophétie et les révélations fleurissaient comme aux plus beaux jours. Il en résultait de graves abus. Les prophètes individuels devenaient le fléau de l’Église. On allait les interroger sur l’avenir, même pour des affaires temporelles. Ces gens recevaient de l’argent et fai-

  1. Sim. ix, 19.