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se mêler des affaires temporelles étaient amenés à délaisser la compagnie des saints et bientôt à les dédaigner, à rougir d’eux comme confrères, à entendre rire d’eux sans répondre. À demi morts pour la vie spirituelle, ils tombaient dans le doute. Devenaient-ils riches, ils faisaient bande à part, en vertu de ce principe que l’homme est amené presque nécessairement à faire sa société des personnes qui ont la même fortune que lui. Ils évitaient de rencontrer les serviteurs de Dieu, craignant que ceux-ci ne leur demandassent l’aumône. La compagnie des fidèles paraissait humble : on les quittait pour mener avec les gentils une vie plus brillante. Ces mondains n’abandonnaient pas Dieu, mais ils désertaient l’église ; ils gardaient la foi, mais cessaient de pratiquer. Quelques-uns faisaient pénitence et se livraient aux œuvres de charité ; d’autres, emportés dans la compagnie des païens, leur devenaient semblables et s’abandonnaient aux plaisirs. Ce milieu équivoque ne les disposait guère au martyre. Au moindre bruit de persécution, ils faisaient semblant de revenir aux idoles, pour éviter d’être inquiétés.

Dans le sein même de l’Église, que d’imperfections[1] ! Tels fréquentaient assidûment l’assemblée,

  1. Sim. ix, 26, etc.