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ques-uns, moins durs, distinguaient entre ceux qui avaient blasphémé le Christ ou dénoncé leurs frères et ceux qui avaient simplement renié leur foi[1] ; ceux-ci pouvaient être admis à se repentir. D’autres, plus indulgents encore, accordaient la pénitence à ceux qui avaient renié de bouche, non de cœur[2]. Il y avait danger à pousser trop loin la rigueur ; car les juifs cherchaient à gagner à la synagogue ceux que l’Église avait ainsi expulsés[3].

À côté de ces grands coupables, il y avait les faibles, les incertains[4], les mondains, chrétiens honteux en quelque sorte, qui dissimulaient leur état et se voyaient sans cesse amenés à des demi-apostasies[5]. La profession chrétienne était quelque chose de tellement étroit, que, si le chrétien ne vivait pas uniquement dans la société de ses frères[6], il était exposé à des risées perpétuelles. N’existant qu’en vue de la fin du monde, le chrétien de ce temps était tout à fait séquestré de la vie publique. Ceux qui devaient

  1. Lettre des Église de Lyon et de Vienne, dans Eusèbe, H. E., V, i, 25.
  2. Sim. ix, 26.
  3. Actes de saint Pione, § 13.
  4. Δίψυχοι. Ce sont sans doute les ἐπαμφοτερίζοντες et les παραϐαπτισταί d’Épictète (Arrien, Diss., II, ix, 20 et suiv.).
  5. Hermas, Sim. ix, 20 et suiv. ; Mand. xi.
  6. Σύνεσμεν ἀλλήλοις ἀεί. Justin, Apol. I, 67.