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dogmes de religion naturelle[1] ; voilà toute sa supériorité. Jamais théologien n’a ouvert aussi largement que Justin les portes du salut[2]. La révélation, selon lui, est dans l’humanité un fait permanent, elle est le fruit éternel du Logos spermaticos, qui éclaire naturellement l’intelligence humaine. Tout ce que les philosophes et les législateurs, les stoïciens, par exemple, ont jamais trouvé de bon, ils le doivent à la contemplation du Logos. Le Logos n’est autre chose que la raison universellement répandue ; tous ceux qui, en quelque temps et en quelque pays que ce soit, ont aimé et cultivé la raison ont été chrétiens[3]. Socrate brille au premier rang dans cette phalange des chrétiens avant Jésus. « Il ne connut le Christ qu’en partie. » Il ne vit pas toute la vérité[4] ; mais ce qu’il vit fut une fraction du christianisme ; il combattit le polythéisme, comme les chrétiens le combattent, et il eut l’honneur comme eux de donner sa vie dans ce combat. Le Logos est descendu et a résidé tout entier en Jésus. Il s’est disséminé dans les âmes humaines qui ont aimé le vrai et pratiqué le bien ; en Jésus il s’est ramassé tout entier.

  1. Apol. I, 44.
  2. Apol. I, 46.
  3. Comparer Philon, Quod omnis probus liber, § 12.
  4. Apol. II, 8, 10 ; Cf. Apol. I, 5.