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s’imposait ; tous les hommes sensés voyaient qu’il n’y avait de salut pour l’œuvre de Jésus que dans la parfaite réconciliation des deux chefs de la prédication chrétienne. Paul conserva longtemps encore des ennemis acharnés, les nazaréens ; il eut également des disciples exagérés, comme Marcion. En dehors de cette gauche et de cette droite obstinées, il se fit une fusion des masses modérées, qui, bien que devant leur christianisme à l’une des écoles et lui demeurant attachées, reconnurent pleinement le droit des autres à s’appeler chrétiens. Jacques, partisan d’un judaïsme absolu, fut sacrifié ; quoiqu’il eût été le vrai chef des chrétiens de la circoncision, on lui préféra Pierre, qui s’était montré beaucoup moins blessant pour les disciples de Paul. Jacques ne garda de partisans fougueux que parmi les judéo-chrétiens[1].

Il est difficile de dire qui gagna le plus à cette réconciliation. Les concessions vinrent surtout du côté de Paul ; tous les disciples de ce dernier admettaient Pierre sans difficulté, tandis que la plupart des chrétiens de Pierre repoussaient Paul. Mais les concessions viennent le plus souvent des forts. En réalité, chaque jour donnait la victoire à Paul. Chaque

  1. Epiph., hær. xxx, 16.