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plus sinistres terreurs. Ces calamités, au dire des fanatiques, n’avaient qu’une seule cause, la destruction du temple de Jérusalem[1]. Rome courtisane s’est livrée à mille amants qui l’ont enivrée ; à son tour, elle sera esclave. L’Italie, ensanglantée de guerres civiles, deviendra un repaire de bêtes féroces[2]. Les nouveaux prophètes employaient, pour exprimer la ruine de Rome, presque les images mêmes qui avaient servi au Voyant de 69 pour peindre sa sombre fureur[3].

Il était difficile à une société de supporter sans réponse de telles attaques. Les livres sibyllins qui les contenaient, ceux qu’on attribuait au prétendu Hystaspe, et qui annonçaient la destruction de l’empire[4], furent condamnés par l’autorité romaine, et il y eut peine de mort contre ceux qui les posséderaient ou les liraient[5]. La recherche inquiète de l’avenir était, à l’époque impériale, un délit ; presque toujours, en effet, sous ces vaines curiosités se cachaient le désir des révolutions et l’excitation à l’assassinat[6].

  1. Carm. sib., v. 328 et suiv.
  2. Ibid., v. 350-362 ; 464-469. Comp. IV, 145-149.
  3. Ibid., III, 324 et suiv.
  4. Lactance, Div. inst., VIII, 15.
  5. Justin, Apol. I, 44. Celse place les sibyllistes à côté des sectes gnostiques les plus mal famées. Dans Orig., V, 61.
  6. Capitolin, Marc-Aurèle, 13 ; Lucien, Alexander, 32 ; Tertullien, Apol., 35. Cf. Spartien, Adrien, 2 ; Vopiscus, Aurélien, 19, 20 ; Florien, 16, 17.