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Antonin fut un saint Louis pour le cœur et l’honnêteté, avec bien plus de jugement et de portée d’esprit. C’est le plus parfait souverain qui ait jamais régné. Il fut même supérieur à Marc-Aurèle, puisque les reproches de faiblesse qu’on peut adresser à ce dernier ne sauraient s’appliquer à lui[1]. Énumérer ses vertus, c’est énumérer les qualités dont l’homme accompli est susceptible. Tout le monde salua en lui une incarnation du mythique Numa Pompilius[2]. Ce fut le plus constitutionnel des souverains ; avec cela, simple, économe, tout occupé de bonnes œuvres[3] et de travaux publics, éloigné des excès, exempt de rhétorique et de toute affectation d’esprit. Par lui, la philosophie arriva vraiment au pouvoir ; les philosophes furent partout richement pensionnés[4] ; son entourage était déjà tout composé d’ascètes, et la direction générale de l’éducation de Marc-Aurèle fut son ouvrage[5].

Ainsi l’idéal du monde semblait atteint ; la sagesse

  1. Il dissimula toujours ses douleurs privées. Cum animi dolore compressit. Capitolin, Ant. Pius, 3.
  2. Capitolin, Ant. Pius, 13.
  3. Puellæ faustinianæ, Capit., Ant. Pius, 8 ; médaille. Pueri alimentarii, inscriptions et médailles. Desjardins, De tab. alim., p. 29 ; Duruy, Hist. des Rom., IV, p. 435, note 1.
  4. Capit., Ant. Pius, 11.
  5. Capit., Ant. Pius ; Lucien, Démonax, 31.