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subir une vraie persécution[1] : « Ils nous traitent en ennemis, comme s’ils étaient en guerre avec nous, nous tuant, nous torturant, quand ils le peuvent, tout comme vous faites vous-mêmes, » dit Justin aux Romains[2]. Les femmes qui voulaient se convertir étaient fouettées dans les synagogues, accablées de coups de pierres[3]. Les juifs reprochaient aux chrétiens de ne plus partager les rages et les douleurs d’Israël. Les chrétiens commençaient à faire retomber sur l’ensemble de la nation juive un reproche que sûrement ni Pierre, ni Jacques, ni l’auteur de l’Apocalypse ne songeaient à lui adresser, celui d’avoir crucifié Jésus. La mort de Jésus avait été considérée jusque-là comme le crime de Pilate, des grands prêtres, de certains pharisiens, mais non comme le crime d’Israël tout entier. Maintenant les juifs apparaissent comme un peuple déicide, un peuple assassin des envoyés de Dieu, rebelle aux plus évidentes prophéties[4]. Les chrétiens font de la non-reconstruc-

    15 ; Recogn., I, 42, 50. Cf. Barn., 5, 7, 13, 14, 15 ; Clem. Rom., Epist. I, 29.

  1. Διωγμός. Anonyme cité par Eusèbe, H. E., V, xvi, 12.
  2. Justin, Apol. I, 31 ; Dial., 16, 47, 131 ; martyre de Polycarpe, 13 (ὡς ἔθος αὐτοῖς) ; Philosoph., ix, 12.
  3. Anonyme contre les cataphryges, dans Eusèbe, H. E., V, xvi, 12.
  4. Justin, Dial., 48.