L’attrait que Rome exerçait sur tous les sectaires se fit sentir à Justin. Peu après sa conversion, il partit pour la capitale du monde[1], et c’est là qu’il composera ces Apologies qui, à côté de celles de Quadratus et d’Aristide, furent la première manifestation du christianisme aux yeux du public initié à la philosophie. Son antipathie contre les juifs, allumée par le souvenir récent des violences de Bar-Coziba[2], lui inspirera un autre écrit, d’une exégèse aussi singulière que celle d’Ariston de Pella, et où l’erreur et l’injustice seront poussées peut-être encore plus loin.
Les rôles étaient, en effet, intervertis. Les païens, entrant en foule dans l’Église, y devenaient les plus nombreux. Les deux grandes attaches du culte nouveau avec le judaïsme, la pâque et le sabbat, étaient en train de se relâcher chaque jour. Tandis que, à l’époque de saint Paul, le chrétien qui n’observait pas la loi de Moïse était toléré à grand’peine, obligé à toute sorte de concessions humiliantes, c’est maintenant le chrétien judaïsant qu’on veut bien ne pas