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la colonie que Vespasien établit à Sichem et qui valut à cette ville le nom de Flavia Neapolis[1]. Sa famille était païenne[2] et lui donna une éducation hellénique assez soignée[3] Justin avait plus de cœur et de besoins religieux que de facultés rationnelles. Il lut Platon, essaya les diverses écoles philosophiques de son temps, et, comme il arrive aux esprits ardents mais peu judicieux, il ne se satisfit d’aucune. Ce qu’il demandait à ces écoles, c’était l’impossible. Il voulait une solution complète de tous les problèmes que soulèvent l’univers et la conscience humaine. Le sincère aveu d’impuissance que lui faisaient ses divers maîtres le porta vers les disciples de Jésus. Il fut le premier chrétien par scepticisme, le premier qui embrassa le surnaturel, c’est-à-dire la négation de la raison, par mauvaise humeur contre la raison.

Il nous a raconté, avec trop d’art pour qu’on puisse regarder son récit comme une rigoureuse autobiographie[4], son voyage à travers les sectes, ses mécomptes, ses désillusions, le charme qu’exerça sur

  1. Médailles ; Spartien, Sept. Sév., 9. Cf. Jos., B. J., IV, viii, 1.
  2. Apol. I, 1 et 53 ; Dial., 10, 16, 27. — Apol. II, 15, et Dial., 120, ne prouvent pas le contraire, pas plus qu’Épiph., hær., xlvi, 1.
  3. Dial., 1 ; Apol. I, 1, 2, 3, 5, 39, 59, 60. Cf. Otto, 2e édit., prol., p. lxiv et suiv. Il est vrai que plusieurs citations qu’il fait peuvent être de seconde main.
  4. Dial. cum Tryph., 2-8.