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troduisit, une sorte de classification par ordre de matières, impliquant des divisions et des subdivisions comme celles d’un Corpus juris. Ainsi, à côté de la Thora, se forma un second code, la Mischna[1]. On cessa de prendre l’Écriture pour base, et, à vrai dire, avec le goût des interprétations arbitraires qui s’était introduit, l’Écriture était devenue presque inutile. Il ne s’agissait plus réellement de bien comprendre la volonté du législateur ; il s’agissait de trouver à tout prix dans la Bible des arguments pour les décisions traditionnelles, des versets aux-

  1. Mischna répond à peu près à « leçons orales », « reproduction de choses sues par cœur » (en chaldéen, matnita, d’où tanaïm, « docteurs mischniques » ), en opposition avec mikra, « texte écrit pour la lecture publique ». Comparez chez les musulmans korân et sunna. C’est par une légère confusion que les Grecs ont rendu mischna par δευτέρωσις. Saint Épiphane, hær, xv, xxxiii, 9 ; anaceph., p. 1116 ; saint Jérôme, In Is., viii, 14 ; x, 1 ; xxix, 20 ; cf. Opp. t. III, p. 90, 525 ; IV, p. 207, Martianay ; saint Augustin, Contra adv. legis et proph., II, 1 ; saint Maxime, Opp. Dionys. Areop., II, 160 (Anvers, 1634). Saint Épiphane l’interprète très-bien παραδόσεις τῶν πρεσϐυτέρων. Novelles, cxlvi, 1, secunda editio. Saint Jérôme, De viris ill., 18, fait δευτέρωσις synonyme de παράδοσις. Voy. ci-dessus, p. 120, note 3. C’est à tort qu’on a cru pouvoir conclure de certains passages du Talmud (Grætz, IV, 419 et suiv., 494 et suiv.) que la Mischna ne dut être écrite que longtemps après sa rédaction. Le vrai sens de ces passages est qu’on doit enseigner la Mischna, et non la lire d’une façon sacramentelle, tandis que la Bible doit être récitée avec le texte sous les yeux, même par celui qui la sait par cœur.