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Si la Palestine avait voulu, elle fût devenue une province comme la Syrie ; son sort n’eût été ni meilleur ni pire que celui des autres provinces. Au ier siècle, plusieurs juifs étaient arrivés à des rôles d’une importance extraordinaire. Désormais cela ne se verra plus ; il semble que les juifs aient disparu sous terre ; on n’entend plus parler d’eux que comme de mendiants réfugiés dans la banlieue de Rome, assis aux portes d’Aricie, assaillant les voitures et s’accrochant aux roues pour obtenir quelque chose de la pitié du voyageur[1]. Ils sont un troupeau de raïas, ayant il est vrai leur statut et leur magistrat personnel[2], mais hors du droit commun, ne faisant point partie de l’État, quelque chose d’analogue à ce que sont en Europe les Ziganes. Il n’y eut plus un seul juif riche, notable, considéré, frayant avec les gens du monde. Les grandes fortunes juives ne reparurent qu’au vie siècle, surtout chez les Visigoths d’Espagne[3], par suite des fausses idées répandues par

  1. Scholies sur Juvénal, iv, 117-118. Cf. Juv., iii, 14 ; vi, 542.
  2. Origène, Ad. Afr., c. 13 ; De princ., IV, 1 ; Celse, dans Origène, V, 25-41 ; Constit. apost., VI, 24, 25. Voir les Évangiles, p. 22-23, 481-482. Sous les empereurs chrétiens, cette indépendance à la façon de raïas ne fit que se développer, comme on le voit surtout par le code Théodosien, l. XVI, tit. vii, et par Épiphane, hær. xxx, 4, 6, 11. Cf. Tillemont, Hist. des Emp., I, p. 59 et suiv. ; Grætz, Gesch. der Juden, IV, p. 476 et suiv.
  3. Voir surtout les Actes des Conciles de Tolède.