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Le christianisme de ces sectaires était, on le voit, celui que nous avons trouvé chez Cérinthe et chez les ébionites. Leur Évangile était conforme à l’Évangile hébreu[1]. Ils racontaient la scène du baptême de Jésus comme elle était rapportée dans cet Évangile, et croyaient, avec tous les docètes, que Jésus n’avait eu d’un homme que l’apparence[2]. Les récits de Galilée leur semblaient un enfantillage, indigne de la divinité, et que l’on devait expliquer allégoriquement. L’homme Jésus pour ces sectaires n’était rien ; l’éon Christos était tout, et sa vie terrestre, loin d’être la base de la doctrine, n’était qu’une difficulté dont il fallait se débarrasser à tout prix.

Les idées des premiers chrétiens sur l’apparition messianique dans les nues, sur la résurrection, sur le jugement dernier, étaient aussi tenues pour arriérées. La résurrection se faisait pour chacun au moment où il devenait gnosticos[3]. Un certain relâchement des mœurs était la conséquence de ces idées faussement aristocratiques ; le mysticisme a toujours été un danger moral ; car il laisse trop facilement entendre que par l’initiation on est dispensé des devoirs ordinaires. « L’or, disaient ces faux chrétiens, peut traîner dans

  1. Tertullien (Hippolyte ?), Præscr., c. 48 ; Épiph., xxvii, 6.
  2. Saint Cyrille de Jér., Catéch., iv, 9 ; vi, 14.
  3. Comp. II Tim., ii, 18. Comp. Jean, iii, 18.