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c’est peut-être lui qui a raison. La politesse veut même qu’en sa présence vous affectiez de le croire. Le monde n’est pas un couvent, et les prétendus avantages de moralité qu’on obtient par la censure et la délation entraînent des inconvénients bien plus considérables que ceux qu’on avait cru éviter.

L’orthodoxie[1], dans les Épîtres à Tite et Timothée, n’a pas fait moins de progrès que l’épiscopat. Déjà il existe une règle de foi, un centre catholique, qui exclut comme des branches mortes ce qui ne reçoit pas la vie du tronc principal. L’hérétique est un coupable, un être dangereux qu’il faut fuir. Il a tous les vices, il est capable de tous les crimes ; les actes qui sont louables chez le prêtre chrétien, tels que la recherche de la direction des femmes, certaines façons de faire le siège des intérieurs, sont chez lui des attentats[2]. Les hérétiques que l’auteur a en vue paraissent être des esséens, des elkasaïtes, des sectaires judéo-chrétiens, préoccupés de généalogies d’éons, s’imposant des abstinences, de rigoureuses distinctions entre les choses pures et impures, condamnant le mariage[3], et néan-

  1. Ἡ ὑγιαίνουσα διδασκαλία (latinisme pour sana doctrina).
  2. I Tim., i, 4, 6, 7, 20 ; vi, 3-5, 20-21 ; II Tim., ii, 14-16, 23, 25-26 ; iii, 1-9 ; iv, 3 et suiv. ; Tit., i, 10-16 ; iii, 9-11.
  3. I Tim., i, 4, 6, 7 ; iv, 3-4, 7 ; II Tim., iii, 1-9.