Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/106

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Églises, se mettant en rapport les uns avec les autres, constitueront l’Église universelle en une espèce d’oligarchie, laquelle tiendra des assemblées, censurera ses propres membres, décidera des questions de foi et à elle seule formera un vrai pouvoir souverain.

En cent ans, le changement était presque accompli. Quand Hégésippe fait son voyage à travers toute la chrétienté, dans la seconde moitié du iie siècle, il ne voit plus que les évêques ; tout est pour lui une question de succession canonique ; le sentiment vivant des Églises n’existe plus[1]. Nous montrerons que cette révolution ne s’acheva pas sans protestation, et que l’auteur du Pasteur, par exemple, essaye encore de maintenir, contre l’autorité grandissante des prélats[2], l’égalité primitive des presbyteri. Mais la tendance aristocratique finit par l’emporter. D’un côté, les pasteurs ; de l’autre, le troupeau. L’égalité primitive n’existe plus ; l’Église n’est désormais qu’un instrument entre les mains de ceux qui la dirigent, et ceux-ci tiennent leur pouvoir non de la communauté, mais d’une hérédité spirituelle[3], d’une transmis-

  1. Dans Eusèbe, H. E., IV, xxii, 1-3.
  2. Πρωτοκαθεδρίται (Hermas, Vis. iii, 9). Irénée (dans Eusèbe, H. E., V, xxiv, 14) appelle encore les évêques de Rome des presbyteri (οἱ πρεσϐύτεροι οἱ προστάντες τῆς ἐκκλησίας). Voir ci-après p. 420.
  3. Διαδόχη.