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différences, éteint toutes les rivalités[1]. C’est la doctrine de Paul dégagée de ces rudesses qui remplirent la vie de l’apôtre d’amertumes et de dégoûts.

Au point de vue de la valeur historique, deux parts absolument distinctes doivent être faites dans les Actes, selon que Luc raconte les faits de la vie de Paul dont il avait une connaissance personnelle, ou selon qu’il nous présente la théorie convenue de son temps sur les premières années de l’Église de Jérusalem. Ces premières années étaient comme un mirage lointain, plein d’illusions. Luc était aussi mal placé que possible pour comprendre ce monde disparu. Ce qui s’était passé dans les années qui suivirent la mort de Jésus était envisagé comme symbolique et mystérieux. Au travers de cette vapeur décevante, tout devenait sacramentel. Ainsi se formèrent, outre le mythe de l’ascension de Jésus, le récit de la descente de l’Esprit-Saint, qu’on rapporta au jour de la fête de la Pentecôte, les idées exagérées sur la communauté des biens dans la primitive Église, la terrible légende d’Ananie et de Saphira, les imaginations qu’on se fit sur le caractère tout hiérarchique du collège des Douze, les contre-sens sur la glossolalie, dont l’effet fut de transformer en

  1. Luc, i, 16 ; Actes, xx, 21.