Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/35

Cette page a été validée par deux contributeurs.

une destinée particulière. Tandis que les six autres épîtres sont très-peu citées, l’épître aux Romains, à partir d’Irénée, est alléguée avec un respect extraordinaire ; les traits énergiques qu’elle renferme pour exprimer l’amour de Jésus et l’ardeur du martyre font en quelque sorte partie de la conscience chrétienne et sont connus de tous. Pearson et, après lui, M. Zahn[1] ont même constaté un fait singulier, c’est l’imitation qu’on trouve dans le paragraphe 3 de la relation authentique du martyre de Polycarpe, écrite par un Smyrniote en l’an 155[2], d’un passage de l’épître d’Ignace aux Romains. Il semble bien que le Smyrniote, auteur de ces Actes, avait dans l’esprit quelques-uns des passages les plus frappants de l’épître aux Romains, surtout le cinquième paragraphe[3].

Ainsi tout assigne à l’épître aux Romains dans la littérature ignatienne une place distincte. M. Zahn reconnaît cette situation particulière ; il montre très-

  1. Ouvr. cité, p. 517.
  2. C’est la date que les travaux de M. Waddington assignent à la mort de Polycarpe. Voir ci-après, p. 425, note 1.
  3. Ce qui infirme ce raisonnement, c’est que, dans ces mêmes Actes (§ 22), se trouve une phrase qui en rappelle beaucoup une autre de l’épître prétendue d’Ignace aux Éphésiens, § 12 (un des endroits dont il est le plus difficile d’admettre l’authenticité). Nous croyons qu’ici c’est le faussaire qui s’est souvenu des Actes