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cette catastrophe étrange éprouvassent le besoin de la raconter. Antonius Julianus, un des lieutenants de Titus, en fit un récit qui servit de base à celui de Tacite[1], et que le sort nous a pareillement envié.

La fécondité de Josèphe était inépuisable. Comme beaucoup de personnes élevaient des doutes sur ce qu’il disait dans son Archéologie et objectaient que, si la nation juive eût été aussi ancienne qu’il la faisait, les historiens grecs en auraient parlé, il entreprit à ce sujet un mémoire justificatif, qu’on peut regarder comme le premier monument de l’apologétique juive et chrétienne. Déjà, vers le milieu du iie siècle avant Jésus-Christ, Aristobule, le péripatéticien juif, avait soutenu que les poètes et les philosophes grecs avaient connu les écrits hébreux et y avaient emprunté tous les passages de leurs écrits qui ont une apparence monothéiste. Pour le prouver, il forgea sans scrupule des passages d’auteurs profanes, d’Homère, d’Hésiode, de Linus, qu’il prétendait empruntés à l’Écriture[2]. Josèphe reprit la tâche avec plus d’honnêteté, mais aussi peu de critique. Il fallait réfuter des savants qui, comme Lysimaque d’Alexandrie, Apol-

  1. Minucius Felix, 33. Voir l’Antechrist, p. 511, note. Vespasien et Titus avaient, à ce qu’il paraît, écrit des mémoires sur le même sujet. Jos., Vita, 65.
  2. Clém. d’Alex., Strom., V, 14 ; Eus., Præp. evang., XIII, 12.