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faisant aimer. Il prétendait connaître mieux que personne les exigences d’un pouvoir sans constitution, obligé de se défendre, de se fonder chaque jour.

On sentait, en effet, que ces horreurs avaient leur raison politique, que ce n’était pas les caprices d’un frénétique. La hideuse image de la souveraineté nouvelle, telle que l’avaient faite les nécessités du temps, soupçonneuse, craignant tout de tous, tête de Méduse qui glaçait d’effroi, apparaissait en ce masque odieux, injecté de sang, dont le savant terroriste semblait avoir cuirassé son visage contre toute pudeur[1].

C’était principalement sur sa propre maison que se portaient ses fureurs[2]. Presque tous ses cousins ou neveux périrent. Tout ce qui lui rappelait Titus l’exaspérait. Cette famille singulière, qui n’avait pas les préjugés, le sang-froid aristocratiques, la profonde désillusion de la haute noblesse romaine, offrait des contrastes étranges. D’épouvantables tragédies s’y jouaient. Quel destin, par exemple, que celui de cette Julia Sabina, fille de Titus, traînée de crime en crime, finissant comme l’héroïne d’un roman de bas

  1. Tacite, Agric., 45 ; Philostrate, Apoll., VII, 28.
  2. Pline, Panégyr., 48, 68.